
Mon poème est une pensée. Une pensée sur la transformation.
Le sujet du poème est transformation. Lorsque l’émotion secrète surgit, mûrit, devient expérience, j’écris, et la vie mue en langage et le langage en vie. Le sujet du poème passe de l’inconnu à l’invention d’un silence, des presque mots, des presque sens, d’une ligne qui remue un lieu, qui le retourne et l’atteint.
Et mon poème s’élance, élan d’une mutation, étrangeté d’une subjectivation maximale, imagination visuelle pour reconnaître ce que l’on ne sait pas, ce que l’on ne dit pas.
Un secret inachevable. Mes presque mots coulent dans la lumière. Rayons sur le visage.
Le poème arrive avec la voix et la voix avec le poème. Rythme comme hantise, comme un chant intime et extérieur pour détruire les signes et les consensus. Une ligne, et je fais rentrer mon corps dans le langage. Un mouvement, et le sujet du poème pousse des cris de bouleversements.
Rythme, mais je ne sacrifie pas le secret, l’inconnu. Ainsi, je défends la poésie.

Traité du rythme – Des vers et des proses, G. Dessons, H.Meschonnic, éd. A. Colin (c), couverture, détail